Luminescence végétale : « Il s’agit de fournir une nouvelle lumière urbaine »

Le jury du concours des start-up de Disneyland Paris avait craqué pour le monde fantastique que dessinent les plantes luminescentes d’Aglaé. Mais pour Sophie Hombert, fondatrice de l’entreprise, celle-ci propose une solution d’éclairage qui répond aux enjeux écologiques et économiques pour les collectivités locales
Comment vous est venue l’idée de rendre les plantes lumineuses et de quelle manière cela fonctionne-t-il ?
J’ai fait des études de design à l’École européenne supérieure d’art de Bretagne. Dans ce cadre, j’ai rédigé un mémoire sur la domestication du végétal. Historiquement, l’homme s’est approprié le vivant pour l’exploiter, notamment en l’observant et reproduisant ses mécanismes. C’est le biomimétisme…En tant que designer, j’ai voulu réfléchir à la manière dont nous pouvions utiliser la nature de manière différente, en particulier en utilisant des matériaux le moins transformé possible. C’est le principe du sérum d’Aglaé. Il reproduit le phénomène de luminescence qui existe naturellement chez certains minéraux, les tournesols ou des coraux. Le produit fait apparaître les nervures des feuilles de la plante, crée des reflets colorés et variés sous la lumière noire. Il est biodégradable et ne modifie pas le génome de la plante qui continue de vivre une fois l’effet terminé. Ce dernier peut durer trois mois pour certaines plantes et jusqu’à six mois pour d’autres, comme les succulentes.
L’entreprise parvient-elle à trouver son public ?
En 2016, j’ai créé Aglaé seule et nous sommes à présent une petite dizaine. En termes de chiffre d’affaires, nous avons atteint 400 000 euros en 2022, et nous prévoyons un million d’euros cette année. Pour la première fois, nous allons lever des fonds. Notre métier est celui de designer, il ne consiste pas à vendre des plantes ! Aujourd’hui, nous adressons trois marchés qui concernent le B to B, entreprises privées et collectivités locales. Nous réalisons des scénographies événementielles, par exemple lors du lancement d’un parfum. Notre deuxième marché, en intérieur, se base sur des plantes qui sont par ailleurs stabilisées durant trois à dix ans, la sève étant remplacée par de la glycérine végétale. Elles n’exigent pas d’entretien et sont adaptées aux endroits sans lumière naturelle. Cela peut intéresser la RATP, un SPA, ou une entreprise : dans un open space, nous allons pouvoir définir l’espace en créant des alcôves végétalisées. Notre troisième marché concerne le paysage urbain. Il s’agit de fournir une nouvelle lumière urbaine.
Pour les collectivités locales, quel est l’intérêt d’adopter les plantes luminescentes d’Aglaé ?
Aujourd’hui, on estime que 60 % du parc lumineux des communes doit être remplacé. Certaines collectivités sont en train de rechercher des alternatives aux solutions traditionnelles, d’autant que l’éclairage représente une part non négligeable de leurs dépenses énergétiques. Aujourd’hui, nous avons plusieurs projets en cours. Par exemple, la ville de Nevers a souhaité innover dans son éclairage. L’hiver dernier, ils ont dû éteindre les lumières plus tôt, et ont connu des problèmes d’insécurité et de vandalisme. Nous leur avons proposé des platebandes lumineuses le long du parc… A Chartres, nous avons plusieurs projets dont un cheminement fleuri le long de l’Eure. Il va remplacer des LED dont la lumière blanche gênent les riverains. Nous ne disposons pas encore d’évaluation précise de l’impact des solutions d’Aglaé, toutefois, il est clair qu’elles constituent une solution plus économique et plus écologique, car les plantes absorbent le CO2. De plus, la végétalisation de l’espace apporte aussi une meilleure qualité de vie aux habitants.