Billet de Florestan:
Ras-le-bol de votre trotinette parisienne?
Découvrez à l'occasion du confinement la... branlette entre amis choisis dans un manoir du bocage normand!
Offre exclusive!
Nous vivons une drôle d'époque... Une époque "post" tout!
Post-démocratique et post-républicaine, voire... post-française si l'on considère "l'archipel" diagnostiqué récemment par Jérôme Fourquet dans un livre événement avec la montée de tous les séparatismes et de tous les tribalismes qui sont en train de faire de notre communauté nationale de citoyens un syndic de co-propriétaires mitoyens vivant du mieux qu'ils peuvent, chacun dans sa... bulle.
Si cette archipélisation tribale est désormais possible c'est que le bien commun, autrement dit "la chose publique" n'est plus une évidence partagée par tous. Et comme le pensait André Malraux, derrière toute civilisation se dresse l'évidence du rapport à la Mort et donc du sens donner à la vie humaine. Bref! derrière chaque civilisation humaine, il y a une religion...
Force est de constater avec Marcel Gauchet qui l'avait perçu dès les années 1970/1980 avec son essai majeur sur le "désenchantement du monde" (1985) que l'Europe occidentale et, tout particulièrement la France dite "laïque", sont sorties du Christianisme puisque cette religion, d'après ce grand philosophe normand, est "la religion de la sortie de la religion" en raison d'une foi religieuse chrétienne d'abord fondée sur la liberté de conscience individuelle.
Une époque post-tout donc! Notamment post-chrétienne qui fait que, chaque année, Noël se fait sans Noël: d'un point de vue chrétien, en 2020, cela sent tout particulièrement le sapin puisque la frénésie de consommation commerciale tout comme la liberté de culte, sont frappées d'interdit par l'actuelle crise sanitaire du Covid, une crise historique et "apocalyptique" (au sens grec du mot) c'est-à-dire, qui révèle les vérités profondes de notre époque qui témoignent d'une crise profonde.
Probablement, comme le pense l'autre grand philosophe normand, Michel Onfray, nous vivons le remplacement d'une civilisation (2000 ans de judéo-christianisme) par une autre... Dumoins, on ne sait pas encore trop par quoi!
En attendant, nous voici plongé dans un intermède, un entre-deux où tout risque d'être à nouveau possible en raison de la disparition, chez une partie de plus en plus importante de nos concitoyens, des grands repères spirituels, philosophiques, moraux, politiques ou idéologiques qui faisaient, il n'y a pas si longtemps soit l'objet d'un profond consensus, soit l'objet de grandes oppositions politiques...
Dans cette brume automnale gagnée par des ténèbres de plus en plus épaisses, tous les chats sont gris et certains peuvent être des monstres...
Il y a, d'une part, la tentation nihiliste, du tout qui se vaut, de l'inversion des valeurs, de leur instrumentalisation opportuniste au profit d'un ensauvagement individuel: c'est le grand retour du "combat pour la vie" darwinien pour la plus grande place possible sous le soleil quitte à utiliser la violence. On a déjà connu cette régression avec le totalitarisme fasciste, notamment avec le nazisme qui ne respectait la vie que de ceux qui n'avaient pas peur de la perdre.
Mais il y a, d'autre part, la régression narcissique, égo-centrique, ludique, festive, jouisseuse, infantile de tribus d'adultes urbains pourtant socialement favorisés qui refusent de... grandir pour redevenir des enfants!
Ces expériences régressives qui mélangent opportunément les techniques de développement personnel en faveur dans certaines sectes, avec de prétendues sagesses généralement orientales et autres pratiques suffisamment originales pour épater le gogo, fleurissent sur le marché de la fatigue de soi et s'adressent en priorité non pas au plouc portant gilet-jaune mais à notre soi-disant élite urbaine: une fois de plus, le pouvoir d'achat des bobos aiguisent la créativité de certains promoteurs d'un néo-paganisme doux: le sexe et la fête sans les sacrifices humains...
Dans notre revue de presse normande quotidienne nous sommes donc tombé sur cette réalité pour le moins surprenante:
Le manoir fortifié de Préquelle datant du XVIe siècle situé, nous dit-on, "entre Normandie et Bretagne" (le lieu est tenu secret, il est probable que ce manoir se situe au nord du département de la Mayenne), propose une bulle totalement régressive pour une clientèle de bobos triés sur le volet désireuse d'échapper, grâce à une expérience de luxure poétique, à la dureté du confinement parisien...
Nous avons d'abord hésité à vous en parler. Mais cette "chose" fait partie de la réalité qui se passe chez nous ou pas très loin. Cela nous concerne donc car, au delà de l'aspect finalement dérisoire, ridicule voire pathétique de cette proposition commerciale, il s'agit, pour nous, de réfléchir à l'identité de notre Normandie qui a été vendue par son comité régional de tourisme comme la destination "à vivre pour revivre" où les corps et les âmes fatigués peuvent trouver une expérience existentielle pour se recréer dans la contemplation de la beauté et de la vérité d'un patrimoine cuturel et naturel exceptionnel.
En 2010 lorsqu'il s'était agi de définir le "portrait identitaire" de la Normandie à la demande du CRT, nous avions défendu, au titre du collectif "Bienvenue en Normandie", l'idée d'une identité régionale existentielle pour la Normandie qui s'adresse autant au corps qu'à l'âme humaine.
Rien donc à voir avec l'improbable mascarade proposée ci-dessous!
Bulle régressive tribale pour un confinement loin de Paris, mode d'emploi:
https://www.havredeperche.com/infos
https://www.havredeperche.com/accueil
Citation extraite de la prose visible sur le site... Nous avons sélectionné celle qui est la plus lisible pour un francophone normal. Car dans cette bulle pour bobos parisiens déboussolés, le globiche règne en maître...
La langue française dans cette bulle soi-disant enchantée réservée à une caste supérieure est, bien entendue, proscrite!
Dans ce refuge loin de la pandémie, les journées passent en musique, au rythme des ateliers de danse, de chamanisme ou de dessin. Avec trois maîtres-mots: le «lâcher prise», la «transcendance» et «l'extase». «On voulait vraiment créer une espèce de bulle, où on oublie un petit peu la merde extérieure», résume Louise Vallex, alias «Ziggy Lou», 30 ans sous sa couronne de fleurs. Pour pénétrer cet univers parallèle et ce lieu tenu secret, les participants ont tous présenté un test PCR négatif, à la demande du collectif Perchépolis, qui supervise cet événement miniature faute de pouvoir organiser son festival électro annuel. Une preuve nécessaire pour reléguer la «distanciation sociale» aux oubliettes.
Un atelier de «danse contact»
«Notre pari, c'est de dire qu'on peut s'amuser comme des gosses en étant responsables comme des adultes», explique son directeur artistique, Samy El Moudni, robe carmin et boucles d'oreilles champignons. Les contacts avec l'extérieur de cette «colonie de vacances» atypique se limitent au ravitaillement. «Sans jugement», chacun est ici encouragé à «être son meilleur humain», à grands renforts de costumes et paillettes biodégradables. De quoi créer une atmosphère mi-«Rocky Horror Picture Show» mi-«Peau d'Âne»: entre les murs épais du manoir, un jeune éphèbe nu sert de modèle à des princesses en robes de lumière.
«C'est un confinement complètement improbable», lâche Thomas Lasserre. Le jeune Basque «baigne dans le bonheur», plongé dans un jacuzzi où ses joyeux convives se prélassent, après un atelier de «danse contact», où chacun a appris à onduler en duo en s'appuyant constamment sur le corps de son partenaire.
Stopper la déliquescence du temps
«Le contact charnel, c'est quand même mieux que d'être en visio derrière ton écran», reprend ce célibataire, pour qui la pandémie, avec son cortège de confinements et de couvre-feux, a «élevé les câlins au rang de besoins essentiels». À 20 ans, l'étudiant concède volontiers «être perdu» face à «un monde en plein bouleversement». «Du coup, plonger dans un univers où l'expérimentation est permise, ça m'a paru idéal pour mieux me connaître et me frayer un chemin au milieu de ce chaos.»
«C'est peut-être une fuite, mais je n'avais pas envie de vivre dans un climat anxiogène», songe «Maya», dans son peignoir rose brodé d'un dragon. Alors que le gouvernement s'inquiète publiquement des risques du deuxième confinement pour la santé mentale, la jeune femme de 27 ans - qui souhaite rester anonyme, comme d'autres participants, «regarde de moins en moins les news».
La forteresse est pourtant loin d'être déconnectée. Sous la canopée artificielle de la salle de «coworking», aménagée au sommet d'une tour, les résidents passent la moitié de leurs journées sur le développement de sites web, de projets immobiliers, donnent des conseils juridiques... Travail, créativité: l'équilibre semble stopper la déliquescence du temps provoquée par la pandémie.
Voir aussi cet autre article:
En préparant ce billet, nous avons découvert que derrière cette improbable proposition normande ou mancelle (on ne sait), se cache un projet pour le moins original de réhabilitation et de ré-emploi de notre patrimoine historique architectural national, à savoir: acheter un château dans une province reculée pour une fête et une... partouze quasi permanente!
http://durevie.paris/chateau-perche-retraites-havre-de-perche-prequelle/
Pas sûr que Stéphane Bern appréciera!
Commentaire de Stéphane Mallarmé:
"La chair est triste, hélas! et j'ai lu tous les livres."
(Brise marine, 1865)