Non pas sur Netflix mais ici sur l'Etoile de Normandie...

On aurait pu dire: le Mont-Saint-Michel vu aussi depuis la gargouille, depuis le cul-de-basse-fosse ou autres fausses oubliettes et prisons en carton pâte pour impressionner le touriste venu de loin en mal de sensation et qui en veut pour son argent.

Sur ce dernier point, pas de problème! Tout le monde ou presque au Mont-Saint-Michel en veut à l'argent des pauvres touristes venus ici par millions se faire plumer comme des pigeons sauf rares exceptions que l'on trouve réfugiées dans le spirituel le plus haut possible sur le rocher pour tenter d'échapper à la grande marée de l'épicerie générale...

Une épicerie générale montoise qui est la marée noire permanente qui pollue symboliquement et moralement la destination touristique, culturelle et spirituelle vers la Merveille de l'Occident: arrivé ravi et fasciné par toutes les beautés féériques du site, le touriste repart trop souvent amer sur l'air de: "je me suis fait avoir!" avant de conclure: "je ne remettrai plus les pieds ici!".

Ce constat ne doit certes pas être généralisé mais c'est une réalité suffisamment prégnante pour que les centaines de petites mains, les premiers de corvée qui besognent dans les arrières-boutiques et les arrières-cuisines d'un village trop "touristique" refusent de parler librement de leurs conditions de travail invoquant une "mafia" ou une "omerta" sur le rocher de l'archange.

Or il se trouve qu'il y a quelques jours, dans le cadre de nos activités professionnelles, nous avons eu l'occasion de rencontrer à Caen un jeune homme plutôt sympathique et courageux qui se destine aux métiers de l'hôtellerie et de la restauration: son expérience professionnelle, plutôt douloureuse, dans quelques restaurants du Mont-Saint-Michel, s'est rapidement imposée dans notre conversation...

Votre serviteur lui a demandé s'il était possible de prendre quelques notes dans la perspective d'écrire ici un billet relatant son témoignage: il a accepté moyennant, évidemment, de taire son nom et de ne pas donner les noms des établissements mis en cause.

Les faits décrits ci-après ont été constatés dans le courant des années 2016/2017. Nous sommes en 2020, on espère qu'il y a eu du changement depuis...

Ce témoignage édifiant et courageux nous a donc donné l'idée d'ouvrir une nouvelle série de billets sur l'Etoile de Normandie qui chroniquera régulièrement l'actualité toujours urgente concernant notre Mont-Saint-Michel et en raison de ce qu'on y trouve et de ce qui s'y vit en ce moment, nous avons nommé cette série: "les crapauds dans le reliquaire" d'après le mot célèbre d'un Victor Hugo découvrant pour la première fois l'extraordinaire Mont-Saint-Michel à l'époque affublé d'une hideuse prison.

Aujourd'hui, la boutique a remplacé la prison... Témoignage d'un larbin de cuisine depuis les gargottes du Mont-Saint-Michel!

 Tout d'abord, mon témoin me met en garde: "il ne se passe jamais rien au Mont-Saint-Michel". Dans le petit milieu de l'hôtellerie-restauration du département de la Manche, on sait qu'il se passe des choses guère reluisantes dans les arrières cuisines graisseuses du Mont et il convient de ne jamais en parler. "Si tu parles de ce qui t'es arrivé au Mont, aucun CFA ne voudra pas te prendre" précise-t-il...

Et celui qui fut, à la fois, commis de cuisine et serveur en salle parfois dans plusieurs lieux différents du village montois dans une même journée de me compter par le menu les turpitudes pseudo-gastronomiques des enseignes ayant pignon sur rue au Mont-Saint-Michel pour rouler dans la farine, le beurre et la goule d'oeuf ce brave touriste venu de loin voire de très loin et qui repart plus... léger (du porte-monnaie) quitte à ruiner la réputation de nos produits normands!

Ainsi, devant gérer un service en salle et au bar, notre témoin nous a révélé la recette miracle destiné à tromper le touriste américain (le japonais c'est plus difficile) avec une bouteille, forcément bonne, de Calvados soi-disant "hors d'âge"...

Très simple!

Une fiole de calva trop jeune que l'on mélange ensuite avec du Coca-cola bien brassé pour ôter toute sa mousse et son pétillant fera très bien l'affaire! Il paraît que l'illusion est parfaite: le breuvage ainsi obtenu prend une teinte plus sombre, plus liquoreuse et sucré et voilà un extraordinaire Calvados augeron hors-d'âge de plus de 30 ans vieilli en fût de chêne qui arrive dans votre verre!

Cette escroquerie pourra amuser derrière le comptoir une ou deux fois un jeune serveur qui, officiellement, apprend son métier mais lorsque cela était répété de façon systématique, l'écoeurement vient vite...

De même, évitons au Mont-Saint-Michel, selon le conseil de notre témoin, le vin "cuvée de la maison" car il est, systématiquement ou presque, le résultat du mélange de toutes les bouteilles ouvertes en cuisine: idéal pour faire disparaître un goût de bouchon!

Difficile de ne pas parler d'oeufs et d'omelette lorsqu'on doit évoquer la "gastronomie" (sic!) montoise. Notre jeune témoin est catégorique: "ça fait belle lurette qu'il n'y a plus un seul oeuf frais au Mont-Saint-Michel!" car le Mont-Saint-Michel est à l'omelette ce que l'industrie est à l'artisanat: "on versait le matin dans le batteur qui tournait toute la journée, la goule de jaune d'oeuf par bidon entier. Parfois, pour économiser la camelotte, on coupait avec de l'eau. Je ne vous raconte pas les problèmes d'hygiène..."

Bon appétit!

Et tout ça pour 500€ par mois dont 300 saisis sur salaire pour payer une piaule de 9 mètres carrés à partager avec quelques autres compagnons d'infortune, des Congolais, des Serbes des Polonais et autres pauvres bougres venus de l'Est, sur la "terre ferme" de la "Caserne" et des temps de parcours assez longs entre la piaule et une cuisine dont le sol fut une fois mouillé par l'onde d'une... grande marée!

"J'ai glissé et je me suis fait très mal au bras. Je ne pouvais pas reprendre mon service. Il me fallait un témoin pour justifier mon accident en tant qu'acident de travail. Mais personne n'a voulu parler..."

La spécialité du Mont-Saint-Michel, ce n'est pas l'omelette c'est l'omerta: lorsque les personnels reçoivent, par exemple, des menaces lorsqu'ils veulent signaler des irrégularités: la pression morale d'employeurs dont les affaires commerciales sont contrôlées par deux potentats locaux dont on vous laissera deviner les noms, est permanente.

L'Etat de droit social au Mont-Saint-Michel est souvent, si ce n'est toujours, à marée basse!

Voir aussi:

https://www.ouest-france.fr/normandie/avranches-50300/normandie-des-parlementaires-reclament-davantage-de-moyens-pour-le-mont-6968866

Normandie. Des parlementaires réclament davantage de moyens pour le Mont

Dans un courrier adressé au Premier ministre, des parlementaires manchois demandent que les recettes de l’Abbaye du Mont reviennent davantage à la gestion du site.

Par un courrier adressé au Premier ministre, les Manchois Bertrand Sorre, député LREM, et Jean Bizet, sénateur LR, interpellent Jean Castex sur la répartition des recettes au Mont-Saint-Michel et le manque de moyens de l’Epic, établissement public qui gère le Mont et sa baie.

Ils insistent sur le fait que « le devenir de l’Établissement public national du Mont-Saint-Michel est fondamental pour le développement de l’ensemble de la Baie, tant côté normand que côté breton, au travers de toutes ses dimensions, qu’elles soient économiques, culturelles ou environnementales. La création de cet Epic constitue une réelle opportunité pour une gestion unifiée et dynamique entre l’État et les collectivités locales avec pour objectif de donner davantage au Mont-Saint-Michel et à sa baie une dimension à la hauteur du site emblématique qu’ils représentent ».

Mais selon eux, l’Epic ne dispose pas de moyens financiers suffisants pour assurer ces objectifs. Ils demandent donc au Premier ministre d’interpeller les ministères concernés et en premier lieu celui de la Culture.  Il conviendrait de faire évoluer la contribution du Centre des monuments nationaux à l’Epic. Ceci pourrait faire l’objet d’une programmation qui, à terme, amènerait la participation financière à hauteur de 30 % des recettes de l’Abbaye.  Et ils préviennent :  À défaut, sans véritable capacité budgétaire au-delà de la gestion des charges courantes, l’Epic est voué à l’impuissance…